Le Chevalier et l'Ecuyer
LE CHEVALIER ET L'ECUYER
Avant de donner tout conseil à son écuyer, le Chevalier, lors d'un départ vers une destination encore inconnue, demande qui le servira au cours de ce voyage, de ne pas entreprendre une pareille chose, s'il ne peut accepter, en toute connaissance et en toute conscience, certaines conditions sans lesquelles, d'une part, il deviendra inutile dans les services qu'il pourra rendre au Chevalier et d'autre part, il ne trouvera en cours de route que déboires et désillusions.
L'écuyer n'est pas tenu à une réponse immédiate; la réflexion est nécessaire pour déterminer son départ, ou refuser, s'il se sent incapable de tenir la promesse de se soumettre aux conditions imposées.
La première des conditions demandées, avant tout départ, avant de mettre le pied à l'étrier, est d'oublier le pays et la demeure à partir de laquelle tout a été décidé, ainsi que les parents pour lesquels il ressentait quelque attachement.
C'est une première condition, mais elle est immédiatement suivie d'une autre condition ; il ne se souciera jamais de l'état de son corps, de son âme et de ses pensées. Cette condition l'obligera à ne pas considérer sa fatigue, ni la pluie, ni le vent, ni le soleil. Il ne se souciera pas no plus de savoir si son apparence révèle sa naissance, et si sa pauvreté peut déplaire ou étonner.
S'il a encore quelque intérêt pour que l'état qui affecte sa personnalité, lui soit assez sensible pour en changer son comportement, il sera pour lui en tous points, préférable de ne pas suivre son Chevalier. Il n'essaiera jamais - c'est une autre condition - que ce soit par estime ou par admiration, d'imiter les gestes et les paroles de celui qui l'aura emmené ; il est vrai que ce Chevalier a accepté de parfaire son éducation mais cela n'entraîne jamais aucune suggestion vers une imitation.
Le Chevalier est là pour aider à son développement et l'écuyer, en échange, accepte de le servir, car le service est aussi le sien. S'il imite dans son comportement son compagnon, il étouffera chez lui ce qui est la représentation de l'esprit et il transformera son rôle d'écuyer en un rôle d'esclave ou de mercenaire.
Il y a encore une autre condition pour qu'il soit autorisé au départ ; il vont au loin pour connaître un plus grand nombre de choses et ainsi dans les péripéties du voyage, apprendre ce qu'ils sont lorsque l'habitude n'est pas là pour préciser une voie à suivre.
Il doivent, dans ce voyage, agir constamment ; ils doivent regarder ce qui est nouveau et n'ont pas le temps de se livrer entre eux à de vaines considérations.
Ils n'ont pas non plus à penser que chez eux, toute chose se pratiquerait mieux ; ils doivent agir et servir et cela limite les vaines paroles.
Si l'écuyer ne se sent pas capable de se taire, il devrait rester dans sa maison et ne pas se livrer à cette charge.
En dehors de ces conditions, le Chevalier tient à faire savoir qu'ils sont l'un et l'autre les serviteurs de la même chose et que jamais l'écuyer n'aura à s'imaginer qu'il est le serviteur de son Chevalier.
L'écuyer n'est jamais pour son Chevalier qu'un jeune frère qui est de même essence que lui, soumis à peu près aux mêmes conditions. Ils n'ont jamais l'un et l'autre pour entendre leur coeur battre qu'un seul et même rythme qu'ils ne peuvent mettre en commun et ne jamais différencier. Le Chevalier n'en viendra jamais à partager quoique ce soit avec son écuyer, tout partage est étranger à leur loi ; ce qui est au Chevalier n'est jamais qu'un bien qui est aussi à son écuyer qui peut en
disposer absolument à son gré.
Les conditions demandées à l'écuyer sont absolument observées par le Chevalier sans cela il ne se permettrait jamais de les voir réaliser par l'autre sans que celui-ci en ait compris l'utilité.
Tout ce que le Chevalier demandera à son écuyer correspondra à ce qu'il exige de lui-même. S'il semble parfois sévère, sa sévérité ne sera jamais que celle qu'il s'applique, à chaque instant de son action qui ne cesse jamais.
La première condition à réaliser lorsque l'on désire être un jour armé Chevalier est de servir la Vérité, partout et tout le temps, dans la vie et au-delà de celle-ci sans jamais on ne dévie du serment qui a été formulé, sans aucune obligation extérieure à soi. Le Chevalier sert sa vérité ; pour servir : il faut agir ; il est un acte et cet acte est la Vérité ; c'est là, dans cet acte de vérité, que se voit la source de certaines conditions exigées de l'écuyer qui a décidé d'être prêt un jour à servir en toute conscience après avoir prononcé un serment qui engage son éternité.
Son apprentissage n'est pas soumis à d'aussi grandes responsabilités car en postulant l'état de Chevalier, il a formulé une prétention qui est un acte et celui-ci l'engage à partir du moment où il a été formulé. Tout acte engage celui qui s'en est montré générateur. L'acte inconscient engage moins que l'acte conscient ; mais dans la mesure où les actes appartiennent à des plans plus subtils, ils deviennent plus dangereux dans les conséquences qui naturellement en dérivent.
L'écuyer doit savoir cela, car cela est aussi un appel à la sincérité, il lui est loisible de tenter n'importe quoi, mais s'il décide de telle manière, il doit toujours être conséquent et rattacher son acte à sa décision. Il ne doit jamais espérer qu'il peut s'imaginer grand, bon et agissant sans se sentir obligé à la grandeur, à la bonté et à l'action. Il n'y a pas de rêves vains, tout devient un jour ou l'autre quel que soit le domaine où cela s'est passé, l'exemple et la forme favorables ou néfastes.
Un rêve qui vise la grandeur oblige celui qui l'a rêvé à tenter de réaliser à tout prix cette grandeur entrevue. Pour agir, il faut être libre de ses mouvements, de ses décisions et de ses actions. Ne pas se charger de ce qui peut être évité parce que personne d'autre que soi n'intervient dans cette charge. On peut toujours sans attenter à la liberté d'un autre se débarrasser des considérations qui tiennent à un corps,
et être insouciant pour celui-ci, lorsque l'action le demande.
L'abandon de ce souci permet à ce corps de ne jamais être arrêté dans le service à accomplir par des accidents d'un tel ordre qui pourraient le transformer en un instrument sans souplesse qui arrêterait la liberté de l'acte au lieu de le faciliter, comme il doit être de tout instrument.
L'écuyer ne gênera aucun être autre que lui en se refusant de croire qu'il est bien de se soucier des larmes ou de la joie, qui n sont jamais que les aspects d'un trop grand amour pour une personne périssable dont la souffrance n'est jamais que transitoire et toujours, le résultat d'une pensée qui ne s'est pas révélée juste, d'une action inadéquate au moment, d'une volonté qui n'était jamais qu'un désir indécis.
L'écuyer n'a pas à se soucier du produit de ses erreurs passées, sinon pour savoir, que s'il ne peut rien changer dans le présent, il peut éviter les effet semblables à venir, de la manière la plus simple en se conformant à sa vérité.
S'il ne peut se conformer à sa vérité, le Chevalier démontrera immédiatement qu'il n'est pas ce Chevalier qu'il croyait être. Sa seule vérité est une continuelle action vraie, une et multiple à la fois, vérité et action se confondant et étant en réalité une seule et même chose.
On ne se mêle pas de servir la vérité sans être conscient de la Vérité. La conscience de la Vérité est non seulement essentielle à tout Chevalier, mais elle correspond à la conscience de lui-même, sans formuler du même coup sa soumission à des forces inférieures et accepter l'esclavage alors qu'il est la Liberté.
Il pourrait avant n'importe quel départ ou n'importe quel voyage définir pour lui même sa vérité et voir si elle conforme à la Vérité. Si sa vérité révèle des points incompatibles avec la Vérité en général, c'est qu'il prend l'erreur pour la réalité et qu'il n'a pas encore pris conscience de lui-même.
Si dans sa définition, il y a le moindre soupçon de différence ou de séparation, c'est qu'il s'ignore trop, ou qu'il prend ce qui est matière pour ce qui appartient à l'esprit. Ce manque de sens des valeurs demande qu'il détruise encore certaines manifestations de lui-même et qu'il n'entreprenne qu'ensuite un service ou intervient nécessité de se connaître.
Si l'Ecuyer se conforme à tout ce qui lui a été demandé par le Chevalier, il entreprend un voyage au cours duquel il ne rencontrera jamais comme obstacle et comme succès que lui-même, l'ombre ou la projection de lui-même. L'Ecuyer doit devenir Chevalier ; il doit lutter mais non pas de la manière que l'entend le vulgaire. Cette lutte ne s'applique qu'à l'ignorance et le voyage doit entraîner vers la Connaissance.
Il y a d'autres voies qui mènent à un même but, mais celui qui doit agir ne peut se retrouver que dans l'action et c'est là qu'il trouvera toutes ses richesses, toutes ses transformations, toutes ses questions.
Le Chevalier ne parle pas à son Ecuyer, il lui a dit déjà qu'il était lui-même, si l'Ecuyer souffre du silence du Chevalier, c'est qu'il ne croit pas encore à l'unité, qu'il ne sait pas que l'amour le plus grand est toujours porté par le plus détaché à celui qui est encore encombré d'un bagage inutile qu'il croit utile.
Le Chevalier n'est jamais rien d'autre que son Ecuyer, il le traite de la même manière qu'il se traite lui-même ; si l'Ecuyer découvre des différences entre lui et son Chevalier, elles ne sont jamais que des vêtements qu'il devra abandonner. Plus l'abandon sera rapide, plus vite il se rapprochera du modèle qu'est ce chevalier jusqu'à ce qu'il ne pense même plus qu'il y ait nécessité d'un modèle et qu'il agisse pour défendre sa loi qui est celle de son Chevalier et de tous ceux qu'il croisera au cours du voyage.
Le Chevalier prévient toujours son Ecuyer avant le départ qu'il devra observer avec soin, sans pour cela vouloir comparer, comme le Chevalier observera le silence le plus strict pendant tout le voyage vis-à-vis de son Ecuyer. Celui-ci devra décider lui-même du choix, le meilleur à adopter, jamais il ne rencontrera une réponse ou un assentiment de son Chevalier.
S'il commet une erreur, l'Ecuyer pourra être certain que celui-ci viendra simplement de ce qu'il aura été embarrassé d'un vêtement de trop et que la solution est à sa portée, car il est plus facile de se dépouiller que d'acquérir.
L'Ecuyer doit savoir que seul le dépouillement assure la Liberté et que sans la Liberté il ne sera jamais joyeux. Le dépouillement ne demande aucun effort, il demande simplement de savoir que grand ou petit, jeune ou vieux, on est toujours un fils de roi et que cette qualité donne tous les droits, tous les pouvoirs ainsi que la plus grande indépendance.
L'effort n'est jamais salutaire, le Chevalier s'affirme parce qu'il est le roi il donne partout et toujours parce qu'il est le Roi. Le Chevalier sais que tout lui appartient mais qu'il vaut mieux laisser tant de richesses car celles-ci encombrent au long du voyage. Partout où il se rendra, il pourra choisir ce qui lui convient car il sera toujours chez lui dans un lieu, ami, mais il saura que toutes les richesses ne peuvent que provoquer le souci et l'inquiétude, et gêner le
libre déploiement de celui qui est la Loi et le Roi.
Celui qui tient aux richesses est prisonnier du désir de celles-ci, cela indique simplement qu'il ne les a pas suffisamment éprouvées pour savoir qu'elles l'obligent à rester sur place et que justement le grand art est de voyager. L'Ecuyer apprend de son Chevalier que sur toute la route qui a été suivie par d'autres Ecuyers et d'autres Chevaliers, il y a une série de haltes et qu'à chacune de celles-ci l'épuisement arrête quelques uns, que celui qui est le moins encombré du
poids de ses bagages va plus loin, que seul celui qui a tout abandonné atteint au terme du voyage.
Le Chevalier et son Ecuyer partent à l'aventure, mais il demeure inévitable qu'il faudra un jour retourner là d'où l'on est parti. Il est possible d'échouer dans ce voyage, de ne pas retrouver sa route, de n pas retourner avec ce qui a été la découverte du voyage ; Tous les deux s'engagent à revenir et à revenir plus riches qu'ils ne sont partis sans qu'aucun poids ni aucune parure n'interviennent dans cette sorte de richesse.
Le Chevalier sera l'exemple pour son Ecuyer puis qu'il n'est jamais que lui-même, que cet exemple vient simplement de ce qui lui donne ses canons et ses mesures pour le moment où il aura quitté tous ses vêtements ; Puisque le Chevalier n'est jamais que l'Ecuyer, on ne parlera plus maintenant que du Chevalier.
Celui-c doit enseigner par l'exemple et par l'action l'Ecuyer qui est lui-même. Comme l'enseignement ne s'applique pas aux vêtements, seul le Chevalier apparaîtra, l'Ecuyer sera en lui, son frère, son enfant et aussi la mère future d'un autre Chevalier qui guidera un autre Ecuyer.
Quelques fois le Chevalier se rappellera le temps où il était Ecuyer, cela simplement pour montrer combien toute dépouille entrave. Il prouvera que le Roi le plus puissant est celui qui a tout donné, sans rien réclamer en échange, qui est devenu libre, que l'on rencontre partout en même temps justement parce qu'il est libre et parce qu'il a tout donné.
Le Chevalier est libre mais il n'est pas ignorant, il sait toute chose puisque partout où il se trouve, il est dans un royaume qui est le sien, auquel il a renoncé et pour lequel on vient toujours le consulter lorsque quelque part l'ignorance, la souffrance et la forme trop dense est entrevue.
Le Chevalier est libre parce qu'il sait que ce n'est pas en se fabriquant d'autres cloisons que l'on devient puissant ; il sait que toutes les cuirasses si elles sont ajoutées peuvent un jour ou l'autre être transpercées. Que seul celui qui se déplace à son gré, libre de tous liens et de tous attachements, peut s'éterniser.
Le Chevalier est libre parce qu'il sait ; Il sait aussi parce qu'il est libre ; sa Liberté et sa connaissance ne sont jamais qu'un même fleuve qui coule, dans lequel il s'est jeté et auquel il s'est intégré. Il est libre et il sait, mais il a appris à être libre et a voulu savoir ; il a eu besoin de choisir. Il se trouve qu'il y avait beaucoup de Chevaliers, que chacun d'eux étaient lui-même et qu'il a pu examiner ce qui faisait de l'un un Chevalier heureux, et de l'autre un Chevalier préoccupé.
Le Chevalier préoccupé apprend très vite qu'il n'y a pas de secret pour rendre joyeux le Chevalier, qu'il suffit de tout abandonner ; il apprend que la plus grande simplicité permet d'obtenir la plus grande liberté, que là est toutes la puissance et toute la sagesse.
Le Chevalier sais aussi que puisqu'il doit toujours défendre sa loi, il ne doit jamais arrêter son voyage ; Que chaque fois qu'il se sent épuisé c'est encore le poids de quelque vêtement qui l'oblige à s'arrêter ; Quand on s'arrête on peut s'en dormir. Il sait qu'au réveil, il est possible d'avoir tout oublié, de croire qu'il est bien, d'être là, appuyé sur quelque mur du chemin, pour être soumis aux intempéries, et ignorant quant au choix qui doit intervenir, à l'action à entreprendre.
Pour le Chevalier, il n'y a qu'une seule action, c'est de défendre sa loi, d'être sa loi. Les incidents du voyage ne sont jamais que l'éducation du Chevalier qui lui impose la conclusion de tout abandonner et l'affirmation de celui-ci qui fait que chacun se demande pourquoi il est à la fois puissant, libre et joyeux.
Il est un exemple et comme il a tout abandonné, il ne conserve rien de ce qui peut être gardé sur le chemin. Il rencontre des passants, tous marchent moins vite que lui. Il sait que si le combat doit lui nuire à sa façon, il arriveront à vaincre grâce à lui pour aller ensuite colporter que le combat a été gagné grâce à la prouesse d'un Chevalier, qui n'avait peur de rien, qui ne tenait à rien, qui était fier de sa pauvreté et qui avait fait voeu de n'obéir qu'à lui-même, parce qu'il avait rejoint son Dieu, qu'il se savait maintenant à Dieu que la loi d ce Dieu était se loi et que rien ne pouvait lui arriver.
Alors que tous les passants s'extasient sur le Chevalier, lui se reconnait dans chacun des passants eux s'ignorent en lui. Il voudrait leur dire qu'ils sont tous le même Chevalier que lui mais il ne peut parler à des statues qui jugent qu'il est important d'être une statue, qui souffre à peine pour conserver ce qu'il faudrait briser alors que pour régner il suffit de tout abandonner et de ne jamais rien accepter de nouveau si ce n'est pour le transmettre immédiatement.
Il sait que l'on croit que les vêtements ne sont que les formes qui enveloppent et qui sont visibles aux yeux de tous ; Les unes renoncent à une forme parce que justement celle-ci les gênait déjà mais immédiatement la seule joie de l'effort fait du contentement au autre vêtement. Celui qui s'est crû dépouillé a endossé un autre vêtement qui peut être dangereux puisqu'il ignore qu'il est porté par lui qu'il l' a tissé de ses sentiments et de ses pensées et qu'il y tiendra dans la
mesure où il tiendra à ses sentiments et à ses pensées.
Le Chevalier pour servir sa loi doit être complètement dépouillé et il doit ressembler au mendiant ; pourtant, le Chevalier quel qu'il soit est souvent représenté avec ses armes ce qui se comprend mais aussi avec un attribut qui éveille la perplexité, suscite la question et attire sur lui aussi bien la curiosité avouée que la curiosité contenue.
Cet attribut est toujours un symbole et s'il prend quelques fois une forme matérielle, c'est pour que tous puissent savoir ce qui dans la loi du Chevalier qui ne peut être que la loi en général, est le plus mis en lumière, si bien que la loi entière est éclairée de ce caractère singulier.
Il est toujours très important de savoir ce que l'on sert même lorsqu'il s'agit de la loi. Car cette loi étant soi-même, il est indispensable de savoir ce que l'on est et de se connaître. Celui qui ne veut jamais être surpris par l'acte commis par le voisin ; Ce voisin qu'il considère comme lui-même lorsqu'il a ôté le vêtement qui le différencie, doit auparavant ne jamais se trouver dans le cas où il serait surpris par lui- même et ne comprendrait pas la raison d'un acte commis. C'est toujours le plus puissant qui gagne le combat et le Chevalier n'ignore pas cette règle absolue. Celui qui ne se connaît pas et n'est pas en mesure de prévoir ses
réactions, ne peut affirmer s'il est ou non le plus puissant et l'échec est susceptible de le surprendre.
Le Chevalier sait que le plus puissant l'est parce qu'il est lui-même sûr de son camp et de tous ceux de l'autre camp. Encore faut-il définir ce qu'il est, puisque c'est sa loi, et qu'il la sert.
Il sait en tout cas puisque sa loi est tout ce qu'il est, qu'il est à la fois l'action ininterrompue puisqu'il s'engage au départ à ne jamais arrêter les termes de son voyage pour le
continuer indéfiniment sans jamais supposer qu'il a atteint son but final. Il retournera simplement quand le trajet qu'il aura adopté l'y entraînera à son point de départ, et cela ne sera que pour repartir, généralement avec un ou plusieurs écuyers afin que ceux-ci s'habituent au voyage. Qu'il soit seul ou accompagné d'un écuyer désireux de le servir ou même de plusieurs, cela ne changera rien à une solitude ou une plénitude. Il est à la fois lui-même et tous les autres.
Aucune présence ni aucune absence ne peut rien faire varier à cet état de conscience qui lui appartient et qui est définitif pour lui. Il est invariable et il est puissant, il peut sembler quelques fois très dur, sans douceur clémente, quelques fois capable de la plus grande indulgence, ce ne sont là que des jugements superficiels des autres sur lui-même.
Il exprime toujours la même loi et ce ne sont jamais les autres dans leur vraie nature qui considèrent ces états de changement, c'est la part d'eux-même qu'ils doivent abandonner qui seule peut en être affectée. Le Chevalier s'identifie avec tous ceux qu'il rencontre sur le chemin et sait qu'ils sont lui-même lorsqu'ils constitue l'unité que l'attribut du Chevalier est un manière d'indiquer la vitesse de son pas sur le chemin.
Le Chevalier qui est le centre de cet enseignement a aussi un attribut et cela même indique sa tendance vers un enseignement. Lui-même est parfaitement conscient de son attribut puisqu'il se connaît, sait être la loi et apris conscience de sa lumière sous laquelle il regarde cette loi pour la vivre. L'attribut montré aux autres n'intervient que pour indiquer la route prise par lui et sa stratégie particulière dans son action qui est aussi cette loi.
Le Chevalier a adopté pour attribut une fleur de tournesol laquelle regarde le soleil ce qui déjà fait partie du symbole et aussi parce que sa graine peut à la fois nourrir et servir de semence, que sa fleur ressemble au soleil à qui le bleu et le rouge sont indifféremment recueillis à partir d'elle. Il y a en plus un souvenir pour ce Chevalier qui, date de l'époque où il était écuyer, et où il combattait ce qu'il croyait encore être un ennemi à travers des champs de fleurs de tournesol où il a vécu une expérience qu'il a conservée par ce souvenir.
Il avait combattu pendant toute la journée sous un ciel gris, à travers le même champ de tournesols, la fatigue le rendait indifférent au paysage, à une intervention dans la bataille. Le gris du ciel a cédé la place au soleil.
Le Chevalier alors en écuyer a levé la tête vers celui-ci, sa fatigue en a et complètement dissoute et en baissant les yeux, il a vu un tournesol agir de même; celui-ci étant très haut sur sa tige comme il est fréquent pour cette fleur, touchait le visage de l'écuyer qui appartenait à une race plutôt petite. Il s'est senti le frère du tournesol et pendant un moment, il n'a plus su déterminer s'il était un guerrier ou une fleur sur une pente de montagne, il faut ajouter que son raisonnement a été interrompu par la mort mais qu'il a conservé ce souvenir d'identité.
Puisqu'il a choisi comme attribut cette fleur qui ressemble au soleil il en suivra en quelque sorte le comportement. Ses rayons s'étendront aussi loin que le permettra l'absence d'obstacles, pour étendre ses qualités qui ne sont jamais que sa manière d'être et qui pour l'obstacle rencontré deviennent des bienfaits. Il se tournera toujours vers la lumière et dans cette lumière, il choisira non pas ce qui se singularise ou se particularise mais au contraire ce qui contient tout le reste, en même temps qu'il en fournit l'essence, le rythme, le manière d'être, le germe et la façon de se comporter.
Ce sera là le chemin qu'il choisira pour son périple de Chevalier. Il devra contenir en lui tout ce que contient cette lumière puisqu'elle est la loi à laquelle il se réfère et dont il est constitué et sa constitution sera celle de cette lumière, ses transformations seront celles que permet cette lumière, et son jeu tout en étant celui de cette lumière se déroulera d'une autre façon.
De même que le tournesol pousse sur n'importe quel sol aride, pourvu que le soleil l'éclaire, le sol dominant et contenant la terre tout en l'entourant, le Chevalier sera à la fois le tournesol sur la terre et le soleil qui contient la terre dans sa lumière ; il aura les possibilités du tournesol qui dérivent d'ailleurs de celles du soleil et n'en sont d'ailleurs qu'une autre expression, il aura les possibilités qui sont celles du soleil et il exprimera les unes et les autres lorsqu'il s'agira de sa loi, parce qu'il est sa loi et qu'il combat en son nom.
Il est la lumière, son jeu est celui de la lumière et se déroule de la même manière, il sera la lumière, les couleurs contenues dans la lumière et les couleurs contenues dans le tournesol, il sera ce qui émane du tournesol et de la lumière. La lumière du soleil se décompose en sept couleurs, il sera chacune de ces couleurs suivant le stade du combat. Mais celui qui se tourne vers le soleil est le tournesol, le Chevalier avant d'être ce qu'il est s'est trouvé être écuyer ; celui qui sait qu'il est, mais n'en a pas conscience, se tourne vers celui qui est.
Celui qui est la lumière, contient ce qui recèle la lumière ; le Chevalier produit de ses expériences passées et de ses expériences futures ; il est un moment sur le chemin qu'il a choisi pour y conduire sa monture. Ce moment a été précédé d'un autre moment, au cours duquel il n'était pas encore Chevalier parce qu'il n'était pas encore complètement dépouillé. L'écuyer précède le Chevalier ; les qualités relatives au tournesol s'acquièrent par conséquent avant celles relatives au soleil et est évidemment nécessaire de vouloir être avant d'être.
Le Chevalier a déjà indiqué la méthode : il faut se dépouiller. Mais l'écuyer étant voué à l'action aime savoir comment mener cette action. Il s'aperçoit très vite que se débarrasser d'un vêtement que l'on a adopté parce que l'on le croyait parfaitement adapté au type qu'on voulait réaliser il y a fort longtemps, n'est pas aussi facile que certains pourraient le croire. Si décidé soit-il, il s'aperçoit souvent qu'il a été imposé, il lui est fort difficile de résoudre la difficulté.
Le tournesol étant l'attribut du Chevalier, dans letournesol se trouve l'explication nécessaire à la réalisation de ce dépouillement.
Le Chevalier conseillera de débuter par ce qui est le plus visible et ce qui est le plus visible est ce tournoiement vers la lumière ; que ce regard constant vers la lumière soit une règle absolue car un simple regard vers une ombre plus ou moins inconnue peut complètement faire dévier celui qui n'est pas encore Chevalier.
Le regard baissé vers l'ombre ne fait pas toujours dévier l'écuyer nouvellement au service du Chevalier mais provoque chez lui l'oubli des indications données. Cet été d'oubli peut l'entraîner à se désolidariser de ce qui est son devenir, sa nature profonde, sa seule condition de bonheur et de liberté pour le solidariser avec ce qui est contraire à lui-même.
Il est venu servir son Chevalier pour être lui-même, en se dépouillant en cours de route : Le regard tourné vers l'ombre lui fait endosser d'autres vêtements dont l'épaisseur le charge de plus en plus. Délaisser la lumière que ce soit de son regard ou de sa préoccupation consiste à se retrouver vers la mort alors qu'on était tourné vers la vie.
Même celui qui de temps en temps se tournera vers l'ombre pour tout de suite regarder à nouveau le soleil, ne mourra pas du fait de ses distractions. Mais il laissera infiltrer ce qui devra le plus le troubler, et pendant longtemps l'empêcher de trouver la voie juste ; ce manque de fixité du regard le soumettra au doute et ce doute est une arme sûre à la portée de la main.
Le doute a des facultés multiples pour réussir à s'infiltrer et à détruire ; s'il ne peut s'attaquer à celui qui est la lumière, ou se sait la lumière, il guette celui qui s'en distrait, pour entreprendre sa sinueuse infiltration et l'empêcher un jour d'arriver à s'arracher de ses derniers vêtements.
Ainsi se terminent ces premiers conseils donnés par un Chevalier à son écuyer.
Le Chevalier est parti vers un grand voyage pour lequel l'écuyer doit encore attendre.
Il reste seul en sa demeure et pour l'heure, seul doit aller.
Mais le Chevalier avant de le quitter, l'a dans son coeur et grand secret sacré Chevalier - s'il n'a pas cru devoir l'éclairer davantage sur les obligations de sa charge, c'est qu'il laisse à son écuyer le soin de s'y exercer lui-même et par amour pour lui, il devait s'en séparer.
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